Thinking Onshore

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Kamerun, ma part de lecture de la guerre cachée aux origines de la françafrique.

"La  France  a  mené  une  guerre  au  Cameroun  qui  est  restée  cachée"

 

 

L’Histoire  que  nous  faisons  dépend  de  ce  qu’on  a  appris. L'Histoire qu’on  a  appris  dépend  de  ce  qui  est  écrit. Et  si  les  écrits  devraient  rester  secrets, on  ne  pourra  jamais  donner  à  l’Histoire  du  Cameroun  l’incursion  qui  est  sienne. C’est  donc  la  raison  pour  laquelle  Thomas  Deltombe, Manuel  Domergue et  Jacob Tatsitsa ont  canalisé  leurs  énergies  pour  restaurer  une  partie de  l’Histoire  cachée  du  Cameroun. Celle  de  la  guerre  menée  par  les  autorités  françaises  contre  l’Union  des  Populations  du  Cameroun, laquelle  histoire  est  retracée  dans le  livre intitulé Kamerun ! Une  guerre  cachée  aux  origines  de  la  Françafrique : 1948-1971.

 

 

Pendant  de  nombreuses  années, la  France  a  mené au  Cameroun, une  guerre  qui  est  totalement  effacée  des  programmes  officiels  d’Histoire de ce pays d'Afrique centrale et  même en  France. Une  guerre  enfouie, qui  porte  en  elle  même les  origines  de  la  Françafrique. Il  fallait  donc  ressusciter  à  travers  un  livre  qui « libère  la  parole », la  question  des  opérations de  guerre menées par  les  autorités  françaises  et  leurs  alliées camerounais, voire  même  congolais, tchadiens centrafricains  contre  l’UPC.



Une  guerre  encore cachée

 

 

L’Histoire  de  la  guerre  qui  a  eu  lieu  au  Cameroun, pays  des  membres  de  l’UPC  dont  la  justice  et  la  liberté  s’exprimaient  en  ce  mot « Kamerun », ne  manque  pas  de  faire  parler  d’elle 31 ans après  sa  fin marquée  par  la  mort  du  dernier  Héros  nationaliste Ernest  Ouandié  et  52 ans après  la  proclamation  de  l’indépendance  du  Cameroun. Les  écrits  qui  parlent  de  cette  guerre  sont  restés  secrets. Il faut dire que ces  écrits  sont   contenus  dans un  Centre  d’Archive  en  France  où  des  scellés ont  été  imposés  en  1958, et  ce  pour  100 ans. Ce  qui  perpétue  le  secret  sur  cette  guerre. En  plus,  le  parcours des  gens  qui  ont  assumés  les  responsabilités  de  cette  guerre au  Cameroun  est  assez  terrorisants. Il  s’agit  pour  la  plupart  de ceux  qui  ont  mené  la  guerre  en  Indochine, en  Algérie et  même  de  la  République  de  Madagascar,  et  qui  ne  voulaient  plus conaittre  une  autre  défaite. Ils ont usé  de  tous  les  moyens  et  méthodes  nécessaires. Plus  loin, les  gens  qui  ont  ordonné  la  guerre  faisaient partir  des  deux  bords  politiques  français. Il s'agit de De Gaulle  et  Mitterrand. C’est  d’ailleurs  la  raison  pour  laquelle  en  France, parler  de  ce  moment  et de cette guerre est  interdit  aux  medias. Il faut aussi dire que le « black out » que les différents acteurs ont usé est l’une des méthodes qui a été utilisée pour que le mystère perdure autour de cette guerre  . On peut donc constater dans les médias en France, le silence autour  de cette guerre car sonévocation est interdite aux médias dans ce pays où dans les programmes scolaires on fait montre de l’exemplarité de la décolonisation française réussie en Afrique. Il ne faut pas aussi perdre de vue l’idée selon laquelle lorsqu’on parle de vainqueurs et de vaincus dans les manuels scolaires et aux jeunes qui grandissent avec cette notion ancrée dans la mémoire, les vaincus sont salis au détriment des vainqueurs.


 

Une  répression « Fasciste » contre  l’UPC

 

 

Les  enquêtes  qui  ont  abouti  à  la  publication  de  ce  livre  de  près  de  742 pages sont  révélatrices. Les  représailles collectives  menées  contre  l’UPC  sont  semblables  aux  méthodes  utilisées  pendant  le  Nazisme. On  a  même  assisté  à  une  répression  camouflée à  travers des  disparitions  forcées, des exécutions  publiques. Ces  massacres  orchestrés  sont  la  preuve que  la  guerre à  travers  les  répressions, les  guérillas  et  autres, sont  le  résultat  d’un  long  processus  de  fascisation. Ce  processus aura  été  boosté  par  un séminaire  de  formation des  cadres de  l’Union  Camerounaise  dont  l’un  des  intérêts était  la  copie  des  méthodes  fascistes et  nazis. Il  faut  tout  aussi dire  que  la  guerre  cachée  au  Cameroun  s’inspire  des  techniques  de guerre  des  Vietminh,  à  la  suite  d’une longue étude  menée  par  l’armée française  après  la  défaite  de  Dien Bien Phu. La  guerre  s’est  aussi  faite  d’une  manière  psychologique. Et  dans la  continuité  de  la  fascisation  de cette guerre, on  aura  assisté  à  une  certaine  complicité  multiforme  qui  aura  conduite  à la  destruction  de  l’UPC interdite en  1955. Elle  sera  suivie de  la  persécution  de  plusieurs  minorités  ethniques  camerounaise  à travers  les  zones  de  Pacification  et  de maintien de  l’ordre, des  incendies, des  guérillas. Les  témoignages parlent  des  têtes coupées  et  exposées sur  les  places  de  marché  en  Zone  Bamiléké : cette  fascisation aura connu la  collaboration anglaise et  la  participation des troupes  étrangères africaines(Congo, RCA, Tchad). Les  effets  de  cette  guerre  restent  très  néfastes  au  Cameroun, tant  sur  le  plan  psychologique que  sur  le  plan  migratoire dans  certaines  régions  du  Cameroun. Le  Mungo  est  un  exemple  typique (Baré-Bakem, Nkongsamba...).

 


Les origines de la françafrique

 

 

La guerre menée au Cameroun et qui jusqu’ici était restée secrete a posé les bases de l’organisation mafieuse et occulte connue sous le nom de françafrique. C’est à partir de cette guerre que la France a mis sur pied l’alibi des accords de défense qui lui permettent d’intervenir dans les pays de son pré carré au cas où ses intérêts sont menacés. Et cela s’est perpétué au Cameroun avec Ahmadou Ahidjo. Cette organisation occulte a perpétré en Afrique le système de dominants et dominés, système qui a contribué à maintenir cachée cette guerre dont les chiffres ne sont pas fixes. En établissant ses racines au Cameroun après la conférence tenue à Pau en France en 1950 qui avait pour but d’examiner et de trouver des moyens pour préserver les intérêts français au Kamerun, la françafrique a su s’inscrire dans la durée. Cette durée était ponctuée par la mise sur pied d’un système de continuité. Il consistait à mettre au pouvoir en Afrique des hommes qui devaient assurer la continuité de l’œuvre coloniale, la politique du partir pour mieux rester pronée par De Gaulle. La françafrique est donc depuis ses racines inscrite dans l’histoire.

 


Un  sursaut  qui  nous  interpelle afin  de  donner à  notre  histoire  une  impulsion  nouvelle

 

 

Plus  de  70% de  la  population camerounaise  est  née après  1980  et  ne  connait  qu’un  chef  d’Etat. Si  on  interroge  donc la mémoire  de  cette  jeunesse, on  constatera  qu’elle ne  reconnait que ce  qu’on  lui  apprend depuis  1960. On  lui  apprend une  Histoire  du  Cameroun, éloignée des réalités qui  ont  caractérisées  non  seulement  l’ébranlement  colonial entre  1945  et  1950,  la  répression armée  et  fasciste  contre  l’UPC, mais  aussi cette  indépendance  postiche  baignée dans  le  sang et  les  origines d’une  Françafrique occulte  dans  le  pays  de  Ruben Um Nyobe.

Ce  livre  tombe  à  point  nommé  pour  nous  aider à  faire  un  grand  pas, un  sursaut dans  la  direction de  notre Mémoire  Historique  tronquée  et  affabulée. De la  mise  sur  pied du projet  de  l’Etat français, projet  d’asservissement  des  colonies pour  l’intérêts  français  à  l'instauration de  la  Françafrique, le  Cameroun  a  été  le  laboratoire  d’expérimentation politique français. Il  revient donc  aux  jeunes de  faire  un  sursaut  d’espoir  et  de  sortir  de  ce  formatage  dans  lequel ils  sont  baignés  ou  plongés  depuis fort  longtemps. A  travers ce  travail  de  construction de  la  Mémoire  du  Cameroun  et  de  l’Afrique, la  jeunesse  africaine  doit  trouver  le  point  de  départ  de  la  prise  de  conscience  de  ce  qui  s’est passé, question d’être  sujet  de  son  propre  discours,notre propre discours. Nous  avons  ainsi  un  point  de  départ  pour  la  liberté  à  travers  laquelle  l’Afrique  pourra  écrire  son  Histoire  au dépend de  l’autre, et donner  de  facto  l’orientation  qu’elle  veut  à  cette  Histoire...

Et pour  mieux écrire  cette  histoire, il  faudra  la  faire  connaitre  dès  la  base. Le contenu de  ce  livre,  agréable à  lire, devrait  être  inscrit  dans les  manuels  scolaires  de  l’éducation  de  base  et  du  secondaire.Tel est mon souhait.

 

 

 

Merci Thomas, Manuel et Jacob...


 

Marius M. Fonkou

Etudiant en Histoire, Université de Dschang (Cameroun)

 



13/04/2012
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